
"Troisième année consécutive de baisse du taux de chômage en quartiers prioritaires." Sous ce titre optimiste et accrocheur, l'Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) publie, en ce mois de novembre 2018, une série de cinq fiches, sur le thème du développement économique et de l'emploi dans les quartiers, fraîchement actualisées par les données de l'enquête emploi 2017 de l'Insee.
2017 est en effet cette "troisième année" de baisse de chômage dans les quartiers. Il était alors de 24,7 %, contre 25,3 % en 2016, 26,4% en 2015 et 26,7 % en 2014. Bonne nouvelle, pourrait-on dire, sauf que "le rythme de cette baisse ralentit", note Pascal Dieusaert, le rédacteur des cinq fiches. Et la tendance risque de se ré-inverser avec la réforme des contrats aidés engagée par le gouvernement à l'été 2017, avec des répercussions dès 2018 (voir nos articles ci-dessous). "En 2016, des volumes importants de contrats aidés ont été mis en œuvre, ces derniers bénéficiant notamment aux habitants des quartiers prioritaires. En 2017, ils ont sensiblement diminué (38.500 nouveaux bénéficiaires, contre 58.400 un an plus tôt, ce qui pourrait contribuer au ralentissement de cette baisse du chômage dans les quartiers prioritaires", anticipe Pascal Dieusaert.
Davantage de personnes ont un emploi
Malgré la diminution du taux de chômage, le taux d’activité dans les quartiers prioritaires est encore à 58,8 %, contre 72,4 % dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes.
Et cette baisse du taux de chômage ne signifie pas baisse du nombre de personnes au chômage. En 2017, elle vient en l'occurrence davantage de la progression du nombre de personnes en emploi. Pour la première fois depuis 2014 dans les quartiers prioritaires, le taux d'emploi augmente, passant de 43,5 % en 2016 à 44,3 % en 2017 (65,8% dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes). Cette progression du taux d’emploi en quartiers prioritaires touche aussi bien les femmes (39,4 %, +0,7 point par rapport à 2016) que les hommes (49,7 %, +0,7 point). Cela signifie aussi que seules deux femmes sur cinq issues des quartiers prioritaires et en âge de travailler occupent un emploi.
Entre 2015 et 2016, la situation était différente : "Le chômage avait, dans les quartiers prioritaires, diminué principalement sous l’effet d’une progression de la part des personnes en études ou formation", explique Pascal Dieusaert. Dès lors, "en 2017, l’accès à l’emploi, notamment de ces personnes formées, apparaîtrait comme plus facile".
Un taux d'inactivité de 40 %
L’inactivité est la situation des personnes en âge de travailler et n’étant ni en emploi, ni au chômage. Le taux d’inactivité dans les quartiers dépasse 40 % (soit 13,6 points de plus que dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes) dont 29 % des personnes en dehors du marché de l’emploi le sont pour "maladie, contraintes familiales, découragement, souhait de ne pas travailler, etc." et 12 % sont des personnes en formation ou en études. Ce taux monte à 35,5 % chez les jeunes de 15-29 ans, c’est-à-dire pas si loin des 36,8 % des jeunes des unités urbaines englobantes. "Cette augmentation de la formation chez les jeunes observée depuis 2015 s’inscrit dans le cadre du plan massif de formation porté par les pouvoirs publics qui a permis de doubler le nombre de demandeurs d’emploi en formation pour le porter à 500.000, et dont les effets perdurent en 2017", indique Pascal Dieusaert.
Parmi les plus de 1.250.000 inactifs des quartiers prioritaires, 223.000 soit 17,7 %, sont dans une situation de "halo du chômage". Dit autrement : près d’un inactif sur cinq résidant dans les quartiers prioritaires souhaiterait travailler (12,6% dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes).
72,7 % d'employés et ouvriers, 12% des actifs en sous-emploi
Sur le 1,3 million d’actifs en emploi résidant dans les quartiers prioritaires, 72,7 % sont employés ou ouvriers (42% dans les autres quartiers des unités urbaines comprenant au moins un quartier prioritaire). Inversement, dans les quartiers prioritaires, les cadres, les professions intellectuelles supérieures et les professions intermédiaires sont sous-représentés (22,2 %, contre 52% dans les
autres quartiers des unités urbaines englobantes).
Les CDI ne représentent, dans les quartiers prioritaires, que les trois-quarts des contrats de travail, contre 85 % dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes.
Les contrats à durée déterminée (CDD) et des missions d’intérim représentent, respectivement, 17,3 % et 7,5 % des emplois salariés, contre 10,7 % et 2,6 % dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes.
En 2017, plus de 160.000 actifs en emploi résidant dans les quartiers prioritaires travaillent à temps partiel et souhaitent travailler davantage ou bien sont au chômage technique ou partiel. Ces situations de sous-emploi concernent 12,0 % des actifs occupés, contre 5,7 % dans les quartiers des unités urbaines englobantes.
Mais "même s’il reste à un niveau très élevé, le sous-emploi dans les quartiers prioritaires diminue depuis 2015 (12,0 %, contre 12,8 % en 2016 et 14,1 % en 2015)", relève Pascal Dieusaert.
Un jeune sur cinq en situation d’inactivité, sans pour autant suivre une formation
Les jeunes de moins de 30 ans vivant dans les quartiers prioritaires sont plus fréquemment chômeurs (16,4 %, contre 8,4 % à l’extérieur de ces quartiers) et moins souvent en emploi (29,5 %, contre 46,5 % dans le reste des unités urbaines englobant les quartiers prioritaires).
Près d’un jeune sur cinq est en situation d’inactivité sans pour autant suivre une formation ou des études, contre 8,3 % dans le reste des unités urbaines englobantes.
"Parmi eux figurent un certain nombre de décrocheurs pour qui l’insertion professionnelle est particulièrement difficile", écrit Pascal Dieusaert dans sa fiche "Situation des jeunes sur le marché du travail : une dégradation spécifique aux quartiers prioritaires". Il note également que, "par rapport à 2016 et contrairement aux autres classes d’âges, le nombre de jeunes chômeurs augmente dans les quartiers prioritaires".
300.000 jeunes Neet dans les quartiers
La part de jeunes au chômage passe de 15,6 % en 2016 à 16,4 % en 2017, "sans pour autant atteindre le niveau de 2014 (18,8 %)", précise-t-il. Dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes, cette part diminue en 2017 (8,4 %, contre 9,5 % en 2016, 9,4 % en 2015 et 9,3 % en 2014). Là encore, il l'explique par le "ralentissement sensible du nombre de bénéficiaires de contrats aidés" en 2017.
Les "Neet", ces personnes" ni en emploi ni en études ni en formation" représentent 300.000 jeunes âgés de 15 à 29 ans des quartiers prioritaires, soit un poids deux fois et demi supérieur à celui des jeunes Neet des autres quartiers des unités urbaines englobantes (29,5 %, contre 11,8 %).
De plus, la part de ces jeunes Neet augmente dans les quartiers prioritaires (29,5 % en 2017, contre 29,0 % en 2016) alors qu’elle diminue dans les autres quartiers des unités urbaines englobantes (11,8 %, contre 12,7 % en 2016).
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